La directive 2011/24/UE du 9 mars 2011 relative à l'application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers vise à garantir la mobilité des patients et la libre prestation de services de santé.
Contexte
Les règles de coordination de l'Union européenne garantissent qu'un assuré qui se déplace au sein de l'Union européenne est traité selon les mêmes conditions que les ressortissants des États concernés.
Les règlements de coordination (CE) n° 883/04 et n° 987/09 permettent aux personnes assurées de se faire soigner dans un autre pays européen ou de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein et Norvège) ainsi qu'en Suisse, à la charge de leur régime d'affiliation selon des modalités particulières. Ils fixent des règles communes permettant de coordonner les régimes nationaux de sécurité sociale.
La jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne est venue ensuite enrichir les droits des patients. En intégrant cette jurisprudence (arrêts Kohll, Decker, Smits et Peerbooms, Watts), la directive réaffirme le principe de libre circulation des personnes.
Cette directive est applicable dans les États membres de l'Union européenne et de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein et Norvège). Elle ne s'applique pas à la Suisse. Elle ne s'applique plus au Royaume-Uni depuis 2021.
La directive comporte des règles de coordination en matière de sécurité sociale, qu'il convient d'articuler avec celles prévues par les règlements (CE) n° 883 et n° 987.
Contenu de la directive
Elle a pour objectifs de faciliter l'accès aux soins de santé transfrontaliers sûrs et de qualité élevée, et d'encourager la coopération en matière de soins de santé entre les États membres de l'UE et ceux de l'EEE (Islande, Liechtenstein et Norvège) dans le plein respect des compétences nationales en matière d'organisation et de prestation des soins de santé :
- libre choix par le patient de son prestataire de soins ou de l'établissement de santé, dans le secteur public comme privé ;
- remboursement du patient par l'État d'affiliation, au minimum à hauteur de ce qui lui serait remboursé pour des soins identiques pratiqués dans son pays de résidence et à condition qu'ils fassent partie des prestations couvertes dans cet État ;
- reconnaissance des prescriptions transfrontalières en matière de médicaments ou de dispositifs médicaux : le pays d'origine du patient doit assurer une qualité égale de suivi médical, quel que soit le pays de l'UE où le traitement a été dispensé ;
- mise en place d'un point de contact national chargé de fournir aux patients toute information sur leurs droits. Le Cleiss est point de contact pour la France ;
- mise en place d'un réseau des autorités nationales responsables de la « santé en ligne » en vue de renforcer la continuité des soins et de garantir l'accès à des soins de santé de qualité ;
- création d'un réseau des autorités ou organes responsables de l'évaluation des technologies de la santé pour faciliter la coopération entre les autorités nationales compétentes (voir questions 42 à 45 de la FAQ) ;
À ce propos, il est à noter que l'article 15 de la directive 2011/24/UE a été supprimé et remplacé par le règlement (UE) 2021/2282 du 15 décembre 2021 du Parlement européen et du Conseil concernant l'évaluation des technologies de la santé et modifiant la directive 2011/24/UE.
- encouragement des États membres à collaborer dans le traitement des maladies rares grâce au développement de moyens de diagnostic et de traitement ;
- soutien à la création de réseaux européens de référence des prestataires de soins de santé pour favoriser la mobilité de l'expertise en Europe, voire l'accès à des soins hautement spécialisés grâce à la concentration et à l'articulation des ressources et de l'expertise disponibles ;
- encouragement de la coopération en ce qui concerne la prestation de soins de santé transfrontaliers au niveau régional et local ainsi qu'au moyen des technologies de l'information et de la communication et d'autres formes de coopération transfrontalière. Encouragement des États membres, en particulier les États limitrophes, à conclure des accords entre eux et à coopérer en matière de prestation de soins de santé transfrontaliers dans les régions frontalières.
Personnes couvertes
La directive 2011/24 UE concerne l'ensemble des citoyens de l'Union européenne, les ressortissants des États de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein et Norvège), les réfugiés et apatrides résidant dans un État membre de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, qui sont ou ont été soumis à la législation d'un ou de plusieurs États membres ainsi que les membres de leur famille et leurs survivants.
Elle concerne également les ressortissants d'États tiers, dans les relations entre les États membres de l'Union européenne à l'exception du Danemark qui n'est pas signataire du règlement (UE) n° 1231/2010 du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010.
Elle ne s'applique pas aux ressortissants d'États tiers dans les relations entre les États membres de l'Union européenne et les États de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein, Norvège).
Soins concernés
La directive vise tous les soins de santé dispensés ou prescrits dans un État membre autre que l'État membre d'affiliation. Sont également concernés la prescription et la fourniture de médicaments et dispositifs médicaux dès lors qu'ils sont fournis dans le cadre d'un service de santé.
La directive ne s'applique pas :
- aux soins de longue durée (services d'aide à la personne).
- au don d'organes,
- aux programmes de vaccination publique.
Prestataires de soins concernés
La directive concerne tous les prestataires de soins de santé (publics, privés, conventionnés ou non) exerçant légalement leur activité, indépendamment du caractère « remboursable » de leurs prestations.
Transposition dans le droit français
Les conditions et modalités de remboursement des soins médicaux, telles que prévues par les réglements n° 883/04 et 987/09, dont bénéficient actuellement les patients qui vont se faire soigner dans un autre pays de l'Union européenne, de l'EEE ou en Suisse demeurent applicables.
La directive vient parachever cet édifice en incorporant la jurisprudence de la CJUE et en renforçant les droits des patients en matière d'information, de qualité et de sécurité des soins.
Les règles de prise en charge des soins sont prévues aux articles R160-1 et suivants du code de la sécurité sociale :
- l'article R160-1 concerne les soins médicalement nécessaires lors d'un séjour temporaire ou soins imprévus ou urgents dispensés dans un autre État européen, un État de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein et Norvège) ou en Suisse : ils sont couverts par la Carte européenne d'assurance maladie (CEAM) ou le certificat provisoire de remplacement. La CEAM permet d'attester de ses droits à l'assurance maladie et de bénéficier d'une prise en charge dans le pays de séjour dans les mêmes conditions que les ressortissants de ce pays. Si l'assuré a supporté les frais, il peut aussi être remboursé à son retour par sa caisse d'affiliation.
- l'article R160-2 concerne les soins dits « programmés », lorsque le déplacement dans un autre État européen, un État de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein et Norvège) ou en Suisse est motivé par un traitement médical. Ces soins requièrent une autorisation préalable de prise en charge de la caisse maladie d'affiliation. L'article R160-2 tel qu'issu du décret n° 2015-1865 limite l'autorisation préalable de prise en charge aux soins programmés qui impliquent au moins une nuit d'hospitalisation et à ceux nécessitant le recours à des équipements matériels lourds (notamment scanner et IRM). La liste des soins et traitements lourds soumis à autorisation préalable de prise en charge est fixée par l'arrêté du 27 mai 2014.
Les dispositions de la directive relatives à la reconnaissance des prescriptions établies dans un autre État membre de l'Union européenne sont transposées par les décrets n° 2013-1216 du 23 décembre 2013 (médicaments) et n° 2014-1525 du 17 décembre 2014 (dispositifs médicaux).
La loi n° 2014-201 du 24 février 2014 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé prévoit notamment une obligation d'assurance professionnelle spécifique pour les personnes autorisées à faire usage des titres de chiropracteur et d'ostéopathe.
Le décret n° 2015-223 du 26 février 2015 relatif à l'organisation et à l'adaptation des missions du Cleiss désigne ce dernier comme point de contact au sens de la directive 2011/24/UE.
Articulation de la directive avec le règlement n° 883/2004
La directive concerne essentiellement les soins ambulatoires qu'ils soient programmés ou non. Les soins médicalement nécessaires couverts par la CEAM demeurent régis par les règlements (CE) n° 883/04 et 987/09.
Ainsi, le régime du règlement (CE) n° 883/2004 et de la directive 2011/24/UE coexistent et sont complémentaires. En fonction de la comparaison entre le système du pays d'affiliation et celui du pays des soins, soit la directive, soit le règlement s'applique.
À la différence du règlement (CE) n° 883/04, la directive 2011/24/UE ne s'applique pas à la Suisse.
Règlement (CE) n° 883/2004 :
- Une autorisation préalable (formulaire S2 « droit aux soins programmés ») est nécessaire pour la prise en charge de soins programmés dans un autre pays européen, un État de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein et Norvège) ou en Suisse comportant au moins 1 nuit d'hospitalisation ou pour les soins lourds figurant sur une liste. Les autres soins programmés sont pris en charge sans autorisation préalable (sauf ceux effectués en Suisse).
- Si elle est accordée, la prise en charge s'effectue sur la base des tarifs de l'État de séjour. Si l'assuré a fait l'avance des frais et n'a pas demandé le remboursement au pays de séjour, les dépenses engagées seront remboursées par le pays d'affiliation sur la base des tarifs applicables dans l'État de séjour ou, sur demande de l'assuré, sur la base des tarifs français de la sécurité sociale dans la limite des frais engagés.
Directive 2011/24/UE :
- En France, il existe un dispositif unique d'autorisation préalable au titre de la directive et du règlement pour certains soins programmés (soins requérant au moins 1 nuit d'hospitalisation ou le recours à des équipements lourds).
- Les soins ambulatoires courants (hors hospitalisation complète) ne sont pas soumis à autorisation préalable. Ils sont remboursés uniquement sur la base des tarifs français de la sécurité sociale, dans la limite des frais engagés, si les soins de santé en question font partie du panier de soins remboursables dans l'État d'affiliation du patient.
Textes de référence
Pour en savoir plus