Affaire C 85/99

Vincent Offermanns et Esther Offermanns contre Familienlastenausgleichsfonds

Arrêt du 15 mars 2001

Sécurité sociale - Notion de prestations familiales - Législation nationale prévoyant le versement d'avances sur une pension alimentaire due par un travailleur à son enfant mineur - Condition de nationalité de l'enfant

"Une prestation telle que l'avance sur pension alimentaire prévue par l'österreichische Bundesgesetz über die Gewährung von Vorschüssen auf den Unterhalt von Kindern (Unterhaltsvorschussgesetz) (loi fédérale autrichienne relative à l'octroi d'avances pour l'entretien d'enfants) constitue une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, tel que modifié et mis à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996. En conséquence, les personnes résidant sur le territoire d'un État membre auxquelles les dispositions de ce règlement sont applicables sont admises au bénéfice d'une telle prestation prévue par la législation nationale de cet État membre dans les mêmes conditions que les ressortissants nationaux, conformément à l'article 3 dudit règlement."

Cette affaire concerne deux enfants mineurs et leurs parents qui sont tous de nationalité allemande et qui résident depuis 1987 en Autriche où les deux parents exercent une activité indépendante.

À la suite du divorce du couple en février 1995, la mère a obtenu la garde des enfants et le père s'est engagé lors de la procédure à verser une pension alimentaire pour les enfants. Le père a cessé de verser cette pension à partir de février 1998.

En septembre 1998, les enfants ont formulé une demande d'avance sur pension alimentaire. Cette demande a été refusée au motif que cette prestation était réservée aux ressortissants autrichiens ou aux apatrides résidant en Autriche. La décision de rejet précisait que cette prestation n'étant pas une prestation familiale au sens du règlement (CEE) n° 1408/71, ni un avantage social au sens de l'article 7, paragraphe 2, du règlement n° 1612/68, il n'existait pas de discrimination au regard du droit communautaire.

Le tribunal autrichien demande à la Cour de justice des Communautés européennes si les avances sur pensions alimentaires d'enfants mineurs de travailleurs indépendants peuvent être considérées comme des prestations familiales et si dans ces conditions, il y a lieu de faire application de l'article 3, du règlement (CEE) n° 1408/71, qui vise l'égalité de traitement.

Sur la nature de la prestation autrichienne, la Cour de justice rappelle que pour qu'une prestation puisse être considérée comme une prestation de sécurité sociale, il faut qu'elle soit octroyée en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels, sur la base d'une situation légalement définie et qu'elle se rapporte à l'un des risques énumérés à l'article 4, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 1408/71.

La première condition sur les règles d'octroi de la prestation ne posant aucun problème, la Cour examine si la prestation en cause peut être considérée comme une prestation familiale.

Le Gouvernement autrichien faisait valoir qu'il s'agissait d'un droit propre de l'enfant mineur et non pas d'un droit du travailleur migrant. Sur la distinction de droit propre et de droit dérivé, la Cour rappelle qu'en matière de prestations familiales cette distinction ne s'applique pas. Les enfants relèvent du champ d'application du règlement en leur qualité de membres de la famille d'un travailleur et les dispositions en matière d'égalité de traitement leur sont applicables.

La Cour précise que l'expression "compenser les charges de famille" qui figure à l'article 1er, sous u), i), du règlement (CEE) n° 1408/71, peut viser une contribution publique au budget familial, destinée à alléger les charges découlant de l'entretien de l'enfant. L'avance sur pension allège les charges supportées par le parent qui a la garde des enfants.

La Cour conclut qu'une prestation telle l'avance sur pension alimentaire autrichienne est une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE)
n° 1408/71. De ce fait, il ne peut pas être opposé de condition de nationalité pour l'obtention de cette prestation.