Affaire C 59/95

Francisco Bastos Moriana E. A. contre Bundesanstalt für Arbeit

Arrêt du 27 février 1997

Prestations familiales - Prestations pour enfants à charge - Pensionnés - Orphelins - Pension proratisée - Complément de prestations familiales

"Les articles 77, paragraphe 2, sous b) i) et 78, paragraphe 2, sous b) i), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, doivent être interprétés en ce sens que l'institution compétente d'un État membre n'est pas tenue d'accorder aux titulaires de pensions ou de rentes ou aux orphelins résidant dans un autre État membre un complément de prestations familiales dans le cas où le montant des prestations familiales servies par l'État membre de résidence est inférieur à celui des prestations prévu par la législation du premier État membre, lorsque le droit à la pension ou à la rente, ou le droit de l'orphelin, n'est pas acquis exclusivement au titre des périodes d'assurance accomplies dans cet État. "

Cette affaire oppose plusieurs ressortissants communautaires au Bundesanstalt für Arbeit au sujet de droit à des compléments différentiels de prestations familiales.

Les quatre premiers requérants, de nationalité espagnole, résidant en Espagne, sont titulaires d'une pension d'invalidité allemande liquidée par totalisation-proratisation. Les deux autres, une italienne résidant en Italie, une espagnole résidant en Espagne, perçoivent des pensions de veuves du régime allemand liquidées par totalisation-proratisation et les enfants ne perçoivent pas de pension d'orphelin. Les intéressés ont demandé à la Bundesanstalt für Arbeit que des allocations pour enfants à charge du régime allemand leurs soient accordées pour leurs enfants dans la mesure où ces prestations sont servies pour une période plus longue que celle prévue par la législation de leur lieu de résidence ou parce que ces prestations sont d'un montant plus élevé que dans leur pays de résidence.

L'institution allemande a rejeté cette demande au motif que le versement d'un complément différentiel ne pourrait être effectué dans une telle affaire que si le droit à pension a été acquis exclusivement au titre des périodes d'assurance accomplies en Allemagne.

Le tribunal allemand, saisi des différents recours contre les décisions du Bundesansalt für Arbeit, demande à la Cour de Justice des Communautés Européennes si les articles 77 § 2 sous b) i) et 78 § 2 sous b) i) du règlement (CEE) n° 1408/71 peuvent obliger l'institution d'un État membre à accorder, au titulaire de pensions ou de rentes à la charge de cet État, liquidées dans le cadre du règlement par totalisation-proratisation et non pas uniquement au titre des périodes accomplies dans cet État, un complément de prestations familiales dans la cas où le montant des prestations familiales dans le pays de résidence est inférieur à celui prévu par la législation de l'État débiteur de la pension ou de la rente proratisée.

La commission, comme les représentants du gouvernement espagnol, estiment que le principe de la libre circulation des travailleurs exige que le complément de prestations familiales soit servi même si le droit à pension n'est dû qu'en application du règlement.

L'avocat général observe que dans la jurisprudence antérieure, la Cour a toujours appliqué le principe de complément sans distinguer les hypothèses où les droits à prestations étaient d'origine purement nationale ou n'étaient ouverts qu'en vertu des règles de coordination du règlement. Il précise que dans l'affaire Athanasopoulos e. a., des compléments différentiels ont dû être versés alors que les intéressés n'avaient pas de droit à pension ouvert en vertu de la seule législation nationale et, pour certains cas, les prestations étaient réclamées pour des enfants nés après le départ d'Allemagne. Il ajoute que dans la décision n° 150 adoptée à la suite de l'arrêt Athanasopoulos e. a., la Commission Administrative pour la Sécurité Sociale des Travailleurs Migrants ne semble pas distinguer les pensions accordées sur la base d'une totalisation et celles découlant de la seule législation nationale d'un État membre.

La Cour rappelle que le règlement ne peut pas réduire ou supprimer des droits acquis en vertu de la seule législation nationale et c'est pour cette raison qu'elle a dit pour droit que les dispositions des articles 77 et 78 prévoyant le service des prestations par l'institution du lieu de résidence devaient comporter une exception en matière d'allocations familiales lorsque les droits étaient ouverts à charge d'un autre État membre au regard de sa seule législation.

Toutefois, elle précise que cette interprétation ne peut pas être appliquée lorsque les droits du titulaire de pension ou de rente ou de l'orphelin ne sont ouverts que par application des règles de totalisation prévues dans le règlement. En effet, dans cette interprétation, l'application des articles 77 et 78 ne prive pas les intéressés de prestations accordées en vertu de la seule législation d'un État membre. Elle conclut qu'un État membre n'est pas tenu d'accorder au titulaire de pension ou de rente ou à l'orphelin résidant sur un autre État membre un complément d'allocation lorsque le montant des prestations du pays de résidence est inférieur au montant du premier pays lorsque la pension ou la rente n'est pas acquise exclusivement au titre des périodes d'assurance accomplies dans ce pays.