Affaire C 493/04

L. H. Piatkowski c/ Inspecteur van de Belastingdienst grote ondernemingen Eindhoven

Arrêt du 9 mars 2006

Sécurité sociale - Personne exerçant simultanément une activité salariée et une activité non-salariée dans deux États membres différents - Soumission à la législation de sécurité sociale de chacun de ces États - Règlement (CEE) n° 1408/71 - Article 14 quater, sous b), et annexe VII - Cotisation de sécurité sociale prélevée sur les intérêts versés par une société établie dans un État membre à une personne résidant dans un autre État membre

« Les articles 48 et 52 du traité CE (devenus après modification, article 39 CE et 43 CE), relatifs respectivement à la libre circulation des travailleurs et à la liberté d’établissement, ainsi que l’article 14 quater, sous b), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1606/98 du Conseil du 29 juin 1998, doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à la législation néerlandaise qui intègre dans l’assiette des cotisations sociales les intérêts tels que ceux versés dans l’affaire au principal par une société établie aux Pays Bas à un ressortissant néerlandais résidant en Belgique et soumis, en application dudit règlement et compte tenu de la nature de ses activités professionnelles, aux législations de sécurité sociale de ces deux États membres. »

Monsieur Piatkowski, ressortissant néerlandais, réside en Belgique depuis 1996 et il y exerce des activités de gérant de société, activités considérées au regard du régime belge comme des activités non salariées.

Il est également directeur de la société Vanderheide établie aux Pays-Bas, filiale à 100 % de la Société belge dont Monsieur Piatkowski et son épouse détiennent chacun 50 % des parts. Cette activité pour laquelle l’intéressé a perçu un salaire soumis à l’impôt sur le revenu aux Pays-Bas est considérée par la législation néerlandaise comme une activité salariée.

Monsieur Piatkowski est titulaire d’une créance sur la société DuvedeC BV, établie aux Pays-Bas et détenue à 41 % par Vanderheide. En 1998, l’intéressé a perçu des intérêts sur cette créance dont le montant a été pris en compte pour la détermination du revenu-prime de l’année.

Contestant cette prise en compte, l’intéressé a formulé un recours devant une juridiction néerlandaise.

Le tribunal néerlandais saisi de l’affaire demande à la Cour de justice des Communautés européennes si les articles 48 du traité relatif à la libre circulation et l’article 52 relatif à la liberté d’établissement, ainsi que l’article 14 quater, sous b), du règlement (CEE) n° 1408/71 s’opposent à l’intégration dans l’assiette des cotisations sociales des intérêts tels que ceux versés à Monsieur Piatkowski, alors qu’il n’existe pas de critère clair de rattachement de ces intérêts à l’État membre d’établissement de ladite société.

La Cour rappelle que le règlement met en place un système de coordination qui fixe notamment dans son titre II la détermination de la législation applicable qui, sous réserve des articles 14 quater et 14 septies, permet l’assujettissement à la législation d’un seul État membre.

Elle indique que l’intéressé exerçant une activité non salariée en Belgique et une activité salariée aux Pays-Bas, il devait bien conformément à l’article 14 quater, sous b) et à l’annexe VII acquitter les cotisations sociales auprès du régime belge et du régime néerlandais.

Elle précise que l’article 14, quater sous b), ne permet pas de prélever une double cotisation sur un même revenu ; toutefois, les intérêts litigieux n’étant pas soumis à cotisation sociale en Belgique, la législation néerlandaise ne porte donc pas atteinte au principe d’interdiction de double cotisation sur un même revenu.

Elle ajoute que le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des États membres pour aménager leurs régimes de sécurité sociale, en l’absence d’harmonisation il appartient donc à chaque État de déterminer les conditions d’affiliation à un régime de sécurité sociale, ainsi que le niveau des cotisations dues et les revenus à prendre en compte pour le calcul des cotisations. Il appartient à l’État concerné de respecter le droit communautaire dans l’exercice de ses compétences.

La Cour constate que compte tenu des disparités existant dans les différentes législations le transfert peut selon le cas être plus ou moins avantageux. En effet, en matière de sécurité sociale le traité ne garantit pas au travailleur une neutralité dans le cas d’extension de ses activités sur plus d’un État membre. Il suffit que le travailleur ne soit pas désavantagé par rapport au travailleur qui exerce la totalité de son activité sur le territoire de l’État membre concerné et que les cotisations ne soient pas versées à fonds perdus.

Selon la législation néerlandaise, les revenus provenant de créances à charge d’une société établie aux Pays-Bas font partie du revenu soumis à cotisation de sécurité sociale, cette disposition s’applique indifféremment à tout bénéficiaire de tels revenus sans désavantager les personnes qui ont usé de leurs droits à la libre circulation, par rapport aux personnes qui n’ont jamais quitté le territoire.

De plus, les cotisations versées aux Pays Bas ouvrent droit à une protection sociale en complément de celle dont il bénéficie en Belgique. Elle ajoute que les cotisations supplémentaires n’ouvriront vraisemblablement pas un droit supplémentaire à celles dont il bénéficiait déjà dans cet État. Toutefois, une telle situation relève de la compétence des États à qui il appartient de déterminer le niveau des cotisations ainsi que les revenus à prendre en compte pour le paiement de celles-ci.

Elle conclut que les dispositions de la législation néerlandaise qui intègrent dans l’assiette de cotisations des cotisations sociales les intérêts versés par une société établie au Pays-Bas à une personne soumise à la législation néerlandaise n’est pas contraire aux dispositions des articles 48 et 52 du traité.