Affaire C 475/93

Jean-Louis Thevenon et Stadt Speyer sozialamt contre Landesversicherungsanstaltrheinland-Pfalz

Arrêt du 9 novembre 1995

Règlement (CEE) n° 1408/71, article 6 - Substitution du Règlement aux conventions de sécurité sociale intervenues entre les États membres - Convention franco-allemande

"Les articles 48, paragraphe 2, et 51 du traité CE doivent être interprétés en ce sens qu'ils ne s'opposent pas à ce que le règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, se substitue, conformément à son article 6, à toute convention liant exclusivement deux États membres, lorsqu'un assuré n'a, avant l'entrée en vigueur du règlement n° 1408/71, accompli des périodes d'assurance que dans un des États contractants, même lorsque l'application de la convention bilatérale de sécurité sociale aurait été plus favorable pour l'assuré".

Monsieur Thévenon, de nationalité française, a travaillé en France de 1964 à 1977 avant de travailler en Allemagne où, en 1992, il a formulé une demande de pension d'invalidité. La caisse allemande a liquidé une pension proratisée dans le cadre des règlements communautaires et a refusé de procéder à la liquidation de la pension dans le cadre de la convention franco- allemande du 10 juillet 1950 qui prévoyait la liquidation des pensions d'invalidité conformément à la législation du pays où est survenue l'invalidité. Dans cette hypothèse, l'intéressé aurait bénéficié d'une pension complète allemande et non pas d'une pension proratisée.

Le tribunal allemand auprès duquel Monsieur Thévenon a contesté la décision du LVA tout en observant que, selon l'article 6 du règlement (CEE) n° 1408/71, ledit règlement est applicable au requérant, se demande si compte-tenu de l'arrêt Ronfeldt, il n'y avait pas lieu de faire application de la convention franco-allemande.

Il convient de rappeler que dans l'affaire Ronfeldt, il s'agissait d'une personne qui avait cotisé de 1941 à 1957 auprès du régime allemand avant d'exercer de 1957 à 1971 son activité au Danemark, puis enfin en Allemagne où il avait terminé sa carrière. L'intéressé avait demandé la liquidation de sa pension de vieillesse dans le cadre de la convention germano- danoise qui prévoyait que les assurés pouvaient demander pour la liquidation de leur pension allemande qu'il soit tenu compte des périodes d'assurance au Danemark.

Dans cette affaire, la Cour de Justice des Communautés Européennes avait assimilé au droit national les réglementations issues des conventions internationales conclues entre les États membres et elle avait indiqué que les règlements communautaires ne devaient pas restreindre les droits que les travailleurs tenaient des conventions bilatérales antérieures au règlement et intégrées dans les droits nationaux.

La Cour indique que dans l'affaire Ronfeldt, lorsque Monsieur Ronfeldt était retourné en Allemagne, le Danemark n'avait pas encore adhéré aux Communautés Européennes et la convention germano-danoise n'avait pas encore été remplacée par le règlement (CEE) n° 1408/71. Elle précise que c'est en s'appuyant que ce fait qu'elle a été amenée à conclure que les articles 48 à 51 du Traité s'opposaient à la perte d'avantages de sécurité sociale qui découleraient de l'inapplicabilité à la suite de l'entrée en vigueur du règlement de la convention germano-danoise intégrée au droit national.

Elle observe que dans le cas d'espèce, monsieur Thévenon a exercé son droit à la libre circulation après l'entrée en vigueur du règlement (CEE) n°1408/71, soit à un moment où la convention franco-allemande avait été remplacée par ledit règlement, il ne peut donc pas avoir subi une perte d'avantages en matière de sécurité sociale.

Dans cette affaire, la Cour réduit la portée de l'arrêt Ronfeldt en limitant cet arrêt au cas où le droit potentiel à un avantage à pris naissance avant l'entrée en vigueur du règlement.