Affaire C-430/15

Secretary of State for Work and Pensions contre Tolley

Arrêt du 1er février 2017

Renvoi préjudiciel - Sécurité sociale - Règlement (CEE) n° 1408/71 - Composante "dépendance" de l'allocation de subsistance pour handicapés (disability living allowance) - Personne assurée contre le risque de vieillesse ayant cessé définitivement toute activité professionnelle - Notions de "prestation de maladie" et de "prestation d'invalidité" - Exportabilité

« 1) Une prestation telle que la composante « dépendance » de l'allocation de subsistance pour handicapés (disability living allowance) constitue une prestation de maladie au sens du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, tel que modifié par le règlement (CE) n° 307/1999 du Conseil, du 8 février 1999.

2) L'article 13, paragraphe 2, sous f), du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, tel que modifié par le règlement n° 307/1999, doit être interprété en ce sens que le fait qu'une personne a acquis des droits à une pension de vieillesse au titre des cotisations versées au cours d'une période donnée au régime de sécurité sociale d'un État membre ne s'oppose pas à ce que la législation de cet État membre puisse cesser ultérieurement d'être applicable à cette personne. Il appartient à la juridiction nationale de déterminer, au regard des circonstances du litige dont elle est saisie et des dispositions du droit national applicable, à quel moment cette législation a cessé d'être applicable à ladite personne.

3) L'article 22, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, tel que modifié par le règlement n° 307/1999, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce que la législation de l'État compétent subordonne le bénéfice d'une allocation telle que celle en cause au principal à une condition de résidence et de présence sur le territoire de cet État membre.

L'article 22, paragraphe 1, sous b), et l'article 22, paragraphe 2, du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, tel que modifié par le règlement n° 307/1999, doivent être interprétés en ce sens qu'une personne se trouvant dans une situation telle que celle en cause au principal conserve le droit de percevoir les prestations visées à cette première disposition après avoir transféré sa résidence dans un État membre autre que l'État compétent, à condition qu'elle ait obtenu une autorisation à cet effet. »

Ce litige oppose le Ministre du Travail et des Pensions du Royaume-Uni à Mme Tolley, décédée le 10 mai 2011 (représentée par son mari en sa qualité d'administrateur de la succession), au sujet de la suppression de son droit à percevoir la composante « dépendance » de l'allocation de subsistance pour handicapés (disability living allowance, ci-dessous désignée DLA) au motif qu'elle ne remplissait plus les conditions de résidence et de présence en Grande-Bretagne.

Dès le 26 juillet 1993, Mme Tolley, ressortissante britannique née en 1952, a bénéficié de la composante « dépendance » de la DLA pour une durée indéterminée, au motif qu'elle était dans l'incapacité de préparer elle-même son alimentation. Elle et son mari ont déménagé en Espagne pour s'y établir le 5 novembre 2002. Le Ministre du Travail et des Pensions du Royaume-Uni a considéré qu'à compter du 6 novembre 2002, Mme Tolley ne remplissait plus les conditions pour bénéficier de la composante « dépendance » de la DLA.

La juridiction de renvoi adresse à la Cour de justice de l'Union européenne, en substance, les questions préjudicielles relatives à l'application du règlement n°1408/71 :

Tout d'abord, la composante « dépendance » de la DLA correspond à une prestation en espèces à caractère non contributif, octroyée indépendamment du niveau des revenus de son bénéficiaire. Elle a pour objet la compensation des frais supplémentaires que peut avoir à supporter une personne en raison notamment de son incapacité ou de sa quasi-incapacité de marcher. La Cour de justice de l'Union européenne en déduit que « la prestation en cause au principal constitue une prestation de maladie au sens du règlement n° 1408/71 ».

Ensuite, est rappelé le principe d'unicité de la législation applicable visé à l'article 13 du règlement n° 1408/71. Toutefois, il est précisé que rien n'interdit que la législation de l'État concerné puisse, à un moment ultérieur, cesser d'être applicable à cette personne. La Cour conclut donc que « le fait qu'une personne a acquis des droits à une pension de vieillesse au titre des cotisations versées au cours d'une période donnée au régime de sécurité sociale d'un État membre ne s'oppose pas à ce que la législation de cet État membre puisse cesser ultérieurement d'être applicable à cette personne. Il appartient à la juridiction nationale de déterminer, au regard des circonstances du litige dont elle est saisie et des dispositions du droit national applicable, à quel moment cette législation a cessé d'être applicable à ladite personne ».

Par ailleurs, la situation en cause relève de l'article 22, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1408/71, selon lequel un travailleur salarié ou non salarié qui satisfait aux conditions requises par la législation de l'État compétent a le droit de recevoir les prestations en espèces servies par l'institution compétente après son transfert de résidence sur le territoire d'un autre État membre. La Cour en déduit alors que « ledit article 22, paragraphe 1, sous b), s'oppose à ce qu'un État compétent subordonne le maintien du bénéfice d'une prestation telle que celle au principal à une condition de résidence et de présence sur son territoire ». Elle ajoute que cette prestation peut être exportée « à la condition que le travailleur ait demandé et obtenu de l'institution compétente l'autorisation de transférer sa résidence sur le territoire d'un autre État membre ».