Affaire C-422/22

Zakład Ubezpieczeń Społecznych Oddział w Toruniu contre TE

Arrêt du 16 novembre 2023

Renvoi préjudiciel - Travailleurs migrants - Sécurité sociale - Législation applicable - Règlement (CE) n° 987/2009 - Articles 5, 6 et 16 - Certificat A1 - Inexactitude des mentions - Retrait d'office - Obligation de l'institution émettrice d'engager une procédure de dialogue et de conciliation avec l'institution compétente de l'Etat membre d'accueil - Absence

Les articles 5, 6 et 16 du règlement (CE) n° 987/2009 doivent être interprétés en ce sens que :

l'institution émettrice d'un certificat A1 qui, à la suite d'un réexamen d'office des éléments qui sont à la base de la délivrance de ce certificat, constate l'inexactitude de ces éléments peut retirer ledit certificat sans engager préalablement la procédure de dialogue et de conciliation prévue à l'article 76, paragraphe 6, du règlement (CE) n° 883/2004, avec les institutions compétentes des Etats membres concernés en vue de déterminer la législation nationale applicable.

I. Faits et procédure

Dans cette affaire, la juridiction polonaise interroge la CJUE dans le cadre d'un litige opposant l'organisme compétent polonais à TE, entrepreneur inscrit au registre du commerce polonais et dont les revenus sont imposés en Pologne, au sujet du retrait par l'institution émettrice du certificat A1 attestant de la soumission de TE à la législation polonaise de sécurité sociale du 22 août 2016 au 21 août 2017. Durant cette période, il fournit des prestations de service en France sur la base d'un contrat conclu avec une société établie en Pologne.

Le juge national se demande si l'institution émettrice d'un certificat A1, qui réexamine d'office les éléments ayant justifié sa délivrance et constate leur inexactitude, peut retirer ce certificat sans engager préalablement la procédure de dialogue et conciliation prévue à l'article 76, paragraphe 6, du règlement (CE) n° 883/2004.

II. Réponse de la Cour

Dans ce contexte, la CJUE rappelle que l'article 5 du règlement (CE) n° 987/2009 codifie sa jurisprudence sur la valeur juridique contraignante des certificats A1, qui s'imposent aux institutions des Etats membres autres que l'Etat d'émission. Ce caractère contraignant repose sur les principes de coopération loyale et confiance mutuelle (article 4, paragraphe 3, du traité sur l'Union européenne) impliquant l'obligation pour l'institution émettrice de vérifier durant l'exécution de l'activité à la base de la délivrance du certificat l'exactitude des mentions y figurant et le retirer en cas d'incohérence avec la situation réelle du travailleur.

Cet article 5 prévoit également une obligation procédurale lorsque la décision de retrait prise par l'institution émettrice fait suite à une demande de réexamen adressée par l'institution compétente d'un autre Etat membre. Cette décision doit être adoptée en respectant la procédure de dialogue et conciliation susvisée. Le recours à cette procédure résulte de l'existence d'un différend entre institutions au sujet de la législation applicable. En revanche, aucune modalité procédurale ne s'impose à l'institution émettrice souhaitant retirer d'office un certificat A1. Cette dernière est toutefois tenue postérieurement au retrait d'en informer dans les plus brefs délais les institutions et personnes concernées. Cette obligation d'information implique notamment la communication des données nécessaires à la détermination de leurs droits.

La Cour conclut que l'institution émettrice ayant constaté l'inexactitude des éléments à la base de la délivrance d'un certificat A1 peut le retirer d'office, à savoir sans recourir à la procédure préalable de dialogue et conciliation prévue en cas de demande de réexamen et retrait adressée par l'institution compétente d'un autre Etat membre.