Affaire C 340/94

Ejm de Jaeck contre Staatssecretaris Van Financiën

Arrêt du 30 janvier 1997

Détermination de la législation applicable - Notion d'activité salariée et non-salariée

"Pour l'application des articles 14 bis et 14 quater du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, il convient d'entendre par "activité salariée " et "activité non salariée " les activités qui sont considérées comme telles pour l'application de la législation de sécurité sociale de l'État membre sur le territoire duquel ces activités sont exercées.

Dans l'hypothèse où l'article 14 quater, paragraphe 1, sous b), du règlement précité est applicable, le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que la législation de l'un des deux États membres n'assure la personne concernée que contre une partie des risques couverts par son régime de sécurité sociale dès lors qu'il n'est pas fait, à cet égard, de discrimination entre les nationaux de cet État et les ressortissants des autres États membres.

En cas d'application de l'article 14 quater, paragraphe 1, sous b), du règlement précité, le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que l'un des deux États membres détermine le montant des cotisations à payer par un assuré, qui n'exerce une activité sur son territoire que certains jours ouvrables de la semaine, sans tenir compte des cotisations que cet assuré acquitte éventuellement dans l'autre État membre au titre de l'activité qu'il y pratique les autres jours. "

Monsieur de Jaeck, de nationalité belge, a exercé en 1984 une double activité en Belgique où il résidait et aux Pays-Bas où il était directeur et l'unique actionnaire d'une société à responsabilité limitée, où il se rendait deux jours par semaine. Les institutions néerlandaises compétentes lui ont demandé de verser des cotisations au régime d'assurances sociales néerlandais estimant qu'exerçant une activité non-salariée en Belgique et une activité salariée aux Pays-Bas, il devait être affilié, conformément à l'article 14 quater § 1 sous b) et à l'annexe VII du règlement (CEE) n° 1408/71, à la législation de chacun des États membres où les activités étaient exercées.

Monsieur de Jaeck, contestant cette décision au motif qu'il exerçait en Belgique et aux Pays-Bas une activité non-salariée relevant de l'application de l'article 14 bis du règlement (CEE) n° 1408/71, a saisi les juridictions néerlandaises qui ont posé à la Cour de Justice des Communautés Européennes trois questions préjudicielles.

Le tribunal néerlandais demande tout d'abord à la Cour si l'activité exercée aux Pays-Bas est une activité salariée ou une activité non-salariée.

La Cour de Justice des Communautés Européennes rappelle que, selon l’article 1er sous a) du règlement, les termes "travailleur salarié" ou "travailleur non salarié" désignent toute personne assurée en tant que travailleur salarié ou non salarié dans le cadre d'un régime de sécurité sociale. Elle indique que, dans le chapitre II, il est fait référence aux personnes qui exercent une activité salariée ou non salariée et ces deux notions ne sont pas définies dans le règlement, mais elles renvoient aux définitions qu'en donnent les législations des États membres en matière de sécurité sociale et sont indépendantes de ce que la nature de l'activité exercée revêt au sens du droit du travail.

Elle réfute les arguments avancés par le gouvernement néerlandais en faveur d'une thèse selon laquelle la personne exerçant une activité salariée au sens du titre II, "Détermination de la législation applicable", du règlement correspondrait à la définition de travailleur au sens de l'article 48 du traité. Elle rappelle que le terme travailleur dans le traité, à l'article 48, a une portée communautaire. Si tel n'était pas le cas, les règles communautaires relatives à la libre circulation risqueraient d'être compromises dans la mesure où les législations nationales pourraient alors écarter certaines catégories de personnes.

Elle poursuit que dans le cas d'espèce, les dispositions du titre II du règlement n'ont pas pour but de conférer aux personnes visées des droits particuliers, ces dispositions ont pour seul objet de déterminer la législation applicable. Rien ne peut laisser supposer que le législateur communautaire, pour l'application de ce titre II, ait entendu donner aux notions d'activité salariée et d'activité non salariée une signification communautaire tirée du droit du travail. Elle conclut que pour l'application des articles 14 bis et 14 quater du règlement, les termes d'activité salariée ou d'activité non salariée désignent les activités qui sont considérées comme telles par la législation de l'État membre où elles sont exercées.

Dans sa deuxième question, le tribunal néerlandais cherchait à savoir si dans l'hypothèse de l'application de l'article 14 quater § 1 sous b) le travailleur ne pouvait être assuré que contre une partie des risques, à savoir les risques couverts par les assurances générales néerlandaises et non pas tous les risques qui font partie du régime auquel sont affiliés les travailleurs salariés (notamment le risque chômage).

Sur ce point, la Cour de Justice des Communautés Européennes rappelle que selon une jurisprudence constante, il appartient aux législations de chacun des États membres de déterminer les conditions du droit ou de l'obligation de s'affilier à telle ou telle branche d'un régime. Il faut simplement qu'il n'existe pas de discrimination entre les nationaux et les ressortissants communautaires pour l'application de ces législations.

La dernière question posée par le tribunal néerlandais portait sur la détermination du montant des cotisations lorsque l'assuré n'exerce son activité sur son territoire que certains jours ouvrables.

Dans le cas de l'application de l'article 14 quater § 1 sous b), dans la mesure où les cotisations sont perçues sur la partie des revenus acquis sur son territoire, le règlement n'oblige pas, lorsque l'assuré ne travaille que quelques jours par semaine, de tenir compte des cotisations que cet assuré verse sur le territoire de l'autre État membre au titre de l'activité qu'il pratique tous les jours.

Il faut préciser que dans cette affaire, comme dans l'affaire C 221/95, INASTI contre Claude Hervein, l'avocat général a soulevé l'invalidité de l'article 14 quater § 1 sous b) au motif que la personne qui . exerce une activité salariée dans un État membre et une activité non salariée dans un autre État membre est soumise à la législation de chacun des États, toutefois il n'a pas été suivi par la Cour.