Affaire C 333/00

Eila Päivikki Maaheimo contre Kansaneläkelaitos

Arrêt du 7 novembre 2002

Règlement (CEE) n° 1408/71 - Prestations familiales - Allocation de garde d'enfant à domicile - Condition de résidence de l'enfant

1) " Une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile prévue par la laki (1128/96) lasten kotihoidon ja yksityisen hoidon tuesta (loi relative aux allocations de garde d'enfants à domicile et de garde privée) constitue une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du
14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996.

2) L'article 73 du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, doit être interprété en ce sens que, si l'octroi d'une prestation telle que l'allocation de garde d'enfant à domicile en cause au principal dépend de la résidence effective de l'enfant sur le territoire de l'État membre compétent, cette condition doit être considérée comme remplie lorsque l'enfant réside sur le territoire d'un autre État membre ".

Le litige oppose Madame Maaheimo à la Kasaneläkelaitos (caisse nationale des retraites), au sujet du refus de cette institution de verser à l'intéressée l'allocation de garde d'enfant à domicile prévue par la loi relative aux allocations de garde d'enfant à domicile et de garde privée.

Selon cette loi, tout parent ou toute personne ayant la charge d'un enfant a droit à une place en crèche de la fin du congé parental, jusqu'à ce que l'enfant soit soumis à l'obligation scolaire. Les parents qui n'optent pas pour une place en crèche peuvent bénéficier d'une allocation en vertu de la loi sur l'allocation de garde d'enfant à domicile. Il s'agit d'une aide financière qui est octroyée pour organiser la garde de l'enfant, comme une alternative au placement en crèche.

Cette prestation comprend un montant de base (hoitoraha) et, le cas échéant, un complément de garde (hoitolisä). Le montant de base varie en fonction de l'âge et du nombre d'enfants, le complément de garde quant à lui, est versé intégralement pour un seul enfant, si les revenus de la famille sont inférieurs à un certain montant. La prestation est versée par la caisse nationale de retraite qui est ensuite remboursée par les communes. Le financement de cette allocation de garde incombe donc aux communes.

Madame Maaheimo, ressortissante finlandaise de même que son mari et ses enfants, a obtenu un congé parental pour s'occuper de ses enfants à la maison. À compter du 8 janvier 1998, elle a perçu l'allocation de garde d'enfant à domicile. Le mari de l'intéressée ayant été détaché en Allemagne du 1er mai 1998 au 30 avril 1999, elle l'a rejoint en Allemagne avec ses enfants à compter du 10 juillet 1998.

L'institution finlandaise a cessé de verser l'allocation de garde d'enfant à domicile à partir du 10 août 1998 au motif que les enfants ne résidaient pas en Finlande. Madame Maaheimo, a contesté cette décision et le tribunal finlandais a posé des questions préjudicielles à la Cour de justice des Communautés européennes.

Dans sa première question le tribunal finlandais demande à la Cour si la prestation en cause peut être regardée comme une prestation familiale au sens de l'article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (CEE) n° 1408/71.

Pour le Gouvernement finlandais, l'objectif de cette prestation est l'organisation de la garde des enfants pendant la journée. La commune de résidence qui a pour mission de prévoir des places dans les crèches publiques a également la charge de cette prestation.

Après avoir rappelé qu'une prestation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale si elle est octroyée, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels des bénéficiaires, sur la base d'une situation légalement définie, la Cour de justice constate que le montant de base, comme le complément de l'allocation de garde d'enfant à domicile, sont accordés automatiquement aux personnes qui répondent à certains critères objectifs, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels. Par ailleurs, la prestation en cause vise également à compenser les frais de garde et d'éducation de manière à atténuer les charges financières de la famille. Pour la Cour, le lien étroit qui existe entre les charges de famille et l'allocation fait que l'allocation de garde d'enfant doit être regardée comme une prestation familiale.

Sur la résidence en Finlande exigée par le Gouvernement finlandais au motif qu'il existe un lien entre les places dans une crèche et le droit à l'allocation, la Cour répond que l'attribution de l'allocation n'est pas subordonnée à un défaut de place dans une crèche, ni à une demande antérieure pour obtenir une telle place. Elle conclut que l'allocation de garde d'enfant à domicile est une prestation familiale au sens du règlement (CEE) n° 1408/71.

La Cour rappelle que l'article 73 du règlement est applicable au travailleur qui vit avec sa famille dans un État membre, autre que celui dont la législation lui est applicable. Elle précise que dans un tel cas, le conjoint du travailleur est également en droit d'invoquer cet article. Elle ajoute que la circonstance de ne plus pouvoir opter pour le placement dans une crèche communale ne peut pas remettre en cause les dispositions de l'article 73, dans la mesure où, selon la législation finlandaise, les parents sont libres d'alterner le placement dans une crèche publique et la perception de l'allocation de garde d'enfant à domicile.

Il ressort de ce qui précède que l'épouse d'un travailleur détaché qui accompagne son mari dans le pays de détachement peut prétendre à une allocation de garde d'enfant à domicile qui est normalement servie sous condition de résidence de l'enfant sur le territoire de l'État compétent.