Arrêt du 28 avril 1994
Sécurité sociale - Pension de vieillesse - Accord complémentaire Allemagne-Pays-Bas - Travail obligatoire en Allemagne
"Le droit communautaire ne s'oppose pas à ce que, en application de l'article 2 du quatrième accord complémentaire entre la République fédérale d'Allemagne et le royaume des Pays-Bas, relatif au règlement des droits acquis par les travailleurs néerlandais entre le 13 mai 1940 et le 1er septembre 1945 sous le régime de l'assurance sociale allemande, signé à La Haye le 21 décembre 1956, le travail obligatoire accompli par des ressortissants néerlandais en Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale n'ouvre droit à aucune prestation à la charge du régime allemand d'assurance vieillesse, mais soit comptabilisé dans le régime néerlandais comme s'il avait été fourni aux Pays-Bas."
Dans cette affaire, il s'agit d'un ressortissant néerlandais qui durant la seconde guerre mondiale avait travaillé en Allemagne au titre du travail obligatoire.
L'intéressé avait demandé la liquidation d'une pension allemande rémunérant ses périodes de travail en Allemagne. Cette pension lui avait été refusée au motif qu'aux termes de l'article 2 de l'accord germano-néerlandais, les périodes d'assurance accomplies par des ressortissants néerlandais auprès du régime allemand d'assurance pension entre le 13 mai 1940 et le 1er septembre 1945 sont considérées comme ayant été accomplies sous le régime néerlandais à condition que l'intéressé ait quitté son emploi en Allemagne avant le 1er septembre 1945 et ait regagné les Pays-Bas le 31 décembre 1945 au plus tard, ce qui était le cas du requérant.
Les périodes de travail de Monsieur Hoorn devaient donc, selon cet accord, être rémunérées par une pension néerlandaise et non pas par une pension allemande.
Devant le refus de l'institution allemande, l'intéressé a introduit un recours auprès des tribunaux allemands qui ont demandé à la Cour de Justice si le droit communautaire s'oppose à l'application de l'article 2 de l'accord germano-néerlandais susmentionné.
Le requérant fait valoir que l'accord en cause opère une discrimination entre les ressortissants néerlandais et les ressortissants allemands astreints au travail obligatoire et que l'accord en cause est contraire à l'article 8 du règlement 1408/71 qui décrit les conditions dans lesquelles les États membres peuvent conclure entre eux des conventions de sécurité sociale.
Le montant des pensions néerlandaises sont d'un niveau moins élevé que les pensions allemandes. En effet, aux Pays-Bas, les montants des pensions de vieillesse ne sont pas fixés comme en Allemagne à partir des cotisations versées, mais à partir du nombre d'années d'assurance, et elles sont indexées sur le salaire minimum net néerlandais.
Il aurait été certes plus intéressant pour Monsieur Hoorn d'obtenir une pension du régime allemand qu'une pension du régime néerlandais.
S'agissant de la discrimination, la Cour observe que l'article 3 § 1 du règlement 1408/71 prévoit une égalité de traitement "sous réserve des dispositions particulières contenues dans le présent accord".
Sur ce point, la Cour précise que l'article 7 § 2 c) du règlement prévoit que certaines dispositions de conventions de sécurité sociale énumérées à l'annexe III peuvent rester applicables nonobstant les dispositions des règlements. Or, l'accord complémentaire germano- néerlandais est cité à l'annexe III. Il continue donc à produire ses effets en dépit de l'adoption du règlement 1408/71.
La Cour indique que l'accord se limite à déterminer la législation applicable ; la différence dans le montant des pensions provient de la législation néerlandaise. Elle précise qu'en l'état actuel de la législation communautaire, c'est à chaque État membre qu'il appartient de fixer le montant des pensions servies.
Une telle affaire aurait éventuellement pu se présenter en France, dans la mesure où l'accord complémentaire n°4 entre la France et l'Allemagne contient les mêmes dispositions que l'accord complémentaire germano-néerlandais.