Affaire C 25/95

Siegfried Otte contre Bundesrepublik Deutschland

Arrêt du 11 juillet 1996

Champ d'application matériel - Primes versées sous certaines conditions à des travailleurs de l'industrie houillère - Calcul de la prime - Avantage dans un autre État membre - Règles de cumul

"L'article 4, paragraphes 1 et 2, du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, doit être interprété en ce sens qu'il ne vise pas des prestations qui, telles celles qui sont prévues par les directives allemandes de 1971 et 1988 concernant l'octroi des primes de restructuration aux travailleurs des mines, sont octroyées par un État membre, sous forme de subventions nationales non obligatoires, aux travailleurs entre le moment où ils sont licenciés et le moment où ils atteignent l'âge auquel ils sont admis au bénéfice de la retraite".

Monsieur Otte, ayant travaillé en Allemagne dans le secteur minier et aux Pays-Bas au régime général, a bénéficié à partir de janvier 1987 d'une pension d'invalidité du régime néerlandais et d'une pension d'invalidité du régime allemand des mineurs.

A la suite de son licenciement en 1987, l'intéressé a introduit une demande auprès du Bundesamt afin de pouvoir bénéficier d'une prime de restructuration accordée aux travailleurs des mines, Il faut préciser que cette prime est accordée :

si le travailleur a été licencié par son employeur à la suite de mesures de rationalisation ou d'une fermeture ;

si l'intéressé avait conservé son emploi, il devait, dans les cinq années qui suivent, bénéficier d'une pension de retraite des mineurs. Il devait en outre avoir accompli au moins 180 mois d'assurance au moment de son licenciement et avoir travaillé dans une mine de charbon allemande durant les deux années ayant précédé le licenciement.

le plan social de l'entreprise dans lequel s'inscrit le licenciement doit avoir été arrêté en concertation avec le ministère fédéral de l'économie.

Lors de sa demande, l'intéressé avait mentionné sa pension d'invalidité allemande, mais pas sa pension d'invalidité néerlandaise. Dans un premier temps, pour le calcul de la prime, on a déduit le montant de la pension d'invalidité allemande, puis, lorsque l'institution compétente a appris l'existence de la pension d'invalidité néerlandaise, elle a encore déduit du montant de la prime la pension néerlandaise.

L'intéressé contestant la décision de l'institution allemande, le tribunal saisi de l'affaire a demandé à la Cour de Justice des Communautés Européennes si des prestations telles que la prime de restructuration des travailleurs des mines étaient visées à l'article 4 § 1 et § 2 du règlement (CEE) n° 1408/71.

La Cour, après avoir énuméré les branches de sécurité sociale visées dans le champ d'application matériel des règlements, rappelle que ce n'est pas parce qu'une prestation n'est pas énumérée expressément à l'article 4 § 1 du règlement qu'elle est exclue de son champ d'application. En effet, pour chaque prestation, il convient de déterminer ses éléments constitutifs, ses finalités, ses conditions d'octroi afin de voir s'il est possible d'établir un lien suffisant entre ladite prestation et l'un des risques prévus.

S'agissant de la prime de restructuration, la Cour, après avoir analysé ses conditions d'octroi, indique qu'elle ne peut pas être assimilée à une pension de vieillesse dans la mesure où ce type de prime poursuit un objectif lié à l'emploi, qu'elle n'est ni financée ni acquise sur les cotisations propres de l'assuré, qu'elle s'éteint au décès du bénéficiaire sans qu'aucun droit soit transmis aux survivants. Elle ne peut plus être assimilée à une prestation de chômage car il n'est pas demandé au titulaire de s'inscrire comme demandeur d'emploi et de se tenir à la disposition du marché du travail.

Elle ajoute que cette prime pourrait plutôt être assimilée à une prestation de préretraite non visée dans le champ d'application du règlement. Elle en conclut que la préretraite n'étant pas visée dans le champ d'application du règlement, il n'y a donc pas lieu de faire application des dispositions du règlement en matière de cumul et l'institution allemande était tout à fait en droit de déduire du montant de la prime le montant de la pension d'invalidité néerlandaise.