Affaire C 221/95

INASTI contre Claude Hervein

Arrêt du 30 janvier 1997

Détermination de la législation applicable - Notion d'activité salariée et non-salariée

"Pour l'application des articles 14 bis et 14 quater du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, il convient d'entendre par "activité salariée" et "activité non-salariée" les activités qui sont considérées comme telles pour l'application de la législation de sécurité sociale de l'État membre sur le territoire duquel ces activités sont exercées. "

Cette affaire oppose Monsieur Hervein, de nationalité française, domicilié en France et qui a exercé de 1982 à 1986 les fonctions de président directeur général et d'administrateur dans des sociétés en France et en Belgique.

En Belgique, les présidents directeurs généraux relèvent du régime des travailleurs non-salariés alors qu'en France, ils relèvent du régime des salariés. L'INASTI, estimant que l'intéressé exerçait une activité salariée en France et une activité non-salariée en Belgique, lui a demandé le paiement des cotisations de sécurité sociale du régime belge des non-salariés, conformément à l'article 14 quater § 1 sous b) en liaison avec l'annexe VII du règlement (CEE) n° 1408/71.

Le requérant, au contraire, soutient qu'il s'agit de la même activité exercée dans les deux pays et qu'au regard du droit du travail dans les deux pays, le critère de distinction est le lien de subordination et, qu'en l'absence de lien de subordination, l'activité devrait être considérée comme indépendante, Il demande donc que lui soit fait application de l'article 14 bis du règlement qui prévoit que le travailleur qui exerce une activité non-salariée sur le territoire de deux États membres est soumis à la législation du pays où il réside, s'il exerce une partie de son activité dans son pays de résidence. Selon ce raisonnement, l'intéressé aurait dû être affilié dans un seul État membre, en France, pays de sa résidence.

L'avocat général fait observer que, récemment, la Cour a été amenée à se prononcer dans une affaire semblable se situant avant le règlement (CEE) n° 1390/81 étendant le règlement (CEE) n° 1408/71 aux travailleurs non-salariés. Dans l'arrêt Kemmler (arrêt du 15 février 1996), l'INASTI réclamait des cotisations pour 1981 à une personne qui exerçait la profession d'avocat en Allemagne et en Belgique ; la Cour avait indiqué que les articles 48 à 52 du Traité, s'opposaient à une réglementation nationale telle que la législation belge qui exige des cotisations d'une personne qui est déjà assujettie dans un autre État membre dans la mesure où cette législation n'apporte aucun avantage supplémentaire.

L'entrée en vigueur de la réglementation communautaire visant à coordonner les régimes de sécurité sociale applicables aux non-salariés a entraîné pour les personnes qui exercent ce type d'activité sur le territoire de deux États membres une situation pire de celle qui existait avant l'application du règlement. En effet, les intéressés n'étaient pas tenus en vertu des seules dispositions du Traité (article 52) d'être affiliés et de cotiser sur le territoire de deux États membres, alors que du fait de l'article 14 § 1 sous b) en liaison avec l'annexe VII du règlement (CEE) n° 1408/71 ils le sont.

II ajoute que la différence entre le cas de Monsieur Hervein et celui de Monsieur Kemmler se situe dans le fait que l'obligation d'assujettissement en Belgique résultait de la seule législation nationale alors que dans le cas de Monsieur Hervein, elle résulte de la réglementation communautaire. Il en conclut que l'article 14 quater § 1 sous b) et l'annexe VII du règlement qui prévoient, dans le cas d'une activité salariée dans un État et d'une activité non-salariée d'un autre État, une affiliation dans chacun des États doivent être déclarés invalides.

La Cour de Justice des Communautés Européennes n'a pas suivi son avocat général dans cette affaire. Elle indique que l'élément décisif pour qu'une personne relève du champ d'application personnel du règlement est l'affiliation de cette personne à la législation de sécurité sociale d'un État membre (salariée ou non-salariée) et donc lorsqu'il s'agit de déterminer si une activité doit être considérée comme une activité salariée ou non-salariée aux fins d'application du règlement, il faut dans chaque cas, s'en remettre au statut que lui accorde l'État membre qui applique sa législation.

Elle conclut que pour l'application des articles 14 bis et 14 quater du règlement, la notion d'activité salariée ou non-salariée doit être entendue au sens de la législation où l'activité est exercée.