Arrêt du 07 décembre 2017
Renvoi préjudiciel - Sécurité sociale des travailleurs migrants - Règlement (CEE) no 1408/71 - Article 46, paragraphe 2 - Article 47, paragraphe 1, sous d) - Article 50 - Pension garantie - Prestation minimale - Calcul des droits à pension
1) Le règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) no 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, tel que modifié par le règlement (CE) no 1606/98 du Conseil, du 29 juin 1998, doit être interprété en ce sens que, lors du calcul par l'institution compétente d'un État membre d'une prestation minimale telle que la pension garantie en cause au principal, il n'y a pas lieu d'appliquer l'article 46, paragraphe 2, ni l'article 47, paragraphe 1, sous d), dudit règlement. Une telle prestation doit être calculée conformément aux dispositions combinées de l'article 50 du même règlement et de la législation nationale, sans toutefois faire application de dispositions nationales, telles que celles en cause au principal, relatives au calcul au prorata.
2) Le règlement no 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement no 118/97, tel que modifié par le règlement no 1606/98, et plus particulièrement l'article 50 dudit règlement, doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à une législation d'un État membre qui prévoit que, lors du calcul d'une prestation minimale telle que la pension garantie en cause au principal, l'institution compétente doit tenir compte de l'ensemble des pensions de retraite que l'intéressé perçoit effectivement d'un ou de plusieurs autres États membres.
La demande de décision préjudicielle porte sur l'interprétation de l'article 46, paragraphe 2, et de l'article 47, paragraphe 1, sous d), du règlement (CEE) no 1408/71 et elle a été présentée dans le cadre d'un litige opposant Mme Boguslawa Zaniewicz-Dybeck au Pensionsmyndigheten (Office des pensions, Suède) au sujet de l'octroi d'une pension garantie telle que prévue par le régime général de retraite suédois. La pension garantie constitue la couverture de base de la pension de retraite du régime général suédois. Elle dépend de la période d'assurance et elle peut être accordée aux personnes qui ne disposent pas de pension de retraite fondée sur le revenu ou dont ladite pension ne dépasse pas un certain montant.
Mme Zaniewicz-Dybeck après avoir exercé une activité professionnelle en Pologne puis en Suède où elle a établi sa résidence, a déposé une demande de pension garantie en Suède. Afin de calculer le prorata de pension due à l'intéressée, cette caisse a appliqué une méthode consistant à calculer la pension garantie en retenant les périodes accomplies en Suède et en attribuant à chaque période d'assurance accomplie en Pologne une valeur de pension fictive correspondant à la valeur moyenne de pension des périodes d'assurance accomplies en Suède. Ainsi, la caisse pension a estimé que les pensions de retraite fondées sur le revenu excédaient le plafond de ressources pour l'attribution d'une pension garantie. La pension garantie n'a donc pas été liquidée, décision confirmée par les différentes cours d'appel suédoises.
Mme Zaniewicz-Dybeck a saisi la Cour suprême administrative de Suède en faisant valoir qu'il n'y avait pas lieu de procéder à la conversion des périodes accomplies dans un autre Etat membre puisque la pension garantie suédoise repose uniquement sur la durée des périodes d'assurance, déduction faite de la pension basée sur les revenus perçue en Suède et que, par ailleurs, cette méthode désavantage les travailleurs migrants qui perçoivent une pension d'un faible montant, basée sur les revenus de la part d'un autre État membre.
La juridiction de renvoi estimant qu'il existe une incertitude quant à la manière de calculer la pension garantie suédoise, a demandé à la Cour de Justice européenne de préciser si la méthode de calcul utilisée par la caisse de pension est correcte au regard du règlement 1408/71 et, dans la négative, lorsqu'elle calcule le montant de la pension garantie, s'il convient de tenir compte des pensions de retraite perçues dans les autres Etats membres.
En réponse à la première question, la Cour de Justice européenne rappelle d'emblée sa jurisprudence antérieure stipulant qu'il y a « prestation minimale » lorsque la législation de l'État de résidence comporte une garantie spécifique ayant pour objet d'assurer aux bénéficiaires de prestations de sécurité sociale un revenu minimal dépassant le niveau des prestations auxquelles ils pourraient prétendre en fonction de leurs périodes d'affiliation et de leurs cotisations, ce qui a été confirmé pour la pension garantie suédoise. Dans la mesure où le règlement no 1408/71 n'exige pas que les États membres prévoient des prestations minimales et que toute législation nationale ne comporte donc pas nécessairement ce type de prestation, l'article 46, paragraphe 2, de ce règlement ne saurait imposer des règles spécifiques et détaillées pour le calcul d'une telle prestation.
Par conséquent, le droit de percevoir une prestation minimale, telle que la pension garantie suédoise, doit être évalué non pas sur la base de l'article 46, paragraphe 2, ou de l'article 47, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1408/71, mais conformément aux règles spécifiques contenues dans l'article 50 de ce règlement et la législation nationale pertinente.
En ce qui concerne la deuxième question, la Cour confirme cette même jurisprudence en rappelant que l'article 50 dispose que, lorsque la législation de l'État de résidence prévoit une prestation minimale, la prestation due par cet État sera augmentée d'un supplément égal à la différence entre la somme des prestations dues par les différents États, aux législations desquels le travailleur a été soumis, et cette prestation minimale. Par conséquent l'article 50 doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à une législation d'un État membre qui prévoit que, lors du calcul d'une prestation minimale telle que la pension garantie en cause au principal, l'institution compétente doit tenir compte de l'ensemble des pensions de retraite que l'intéressé perçoit effectivement d'un ou de plusieurs autres États membres.