Affaire C 137/94

Cyril Richardson contre The Secretary Of State For Health

Arrêt du 19 octobre 1995

Égalité de traitement entre hommes et femmes - Exonération du paiement des frais médicaux - Champ d'application matériel de la directive 79/7/CEE - Lien avec l'âge de la retraite

"L'article 3, paragraphe 1, de la directive 79/7/CEE du Conseil, du 19 décembre 1978, relative à la mise en oeuvre progressive du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière de sécurité sociale, doit être interprété en ce sens qu'un régime tel que celui institué à l'article 6, paragraphe 1, du National Health Service (Charges for Drugs and Appliances) Régulations 1989, qui exonère du paiement des frais médicaux certaines catégories de personnes, et notamment certaines personnes âgées, relève du champ d'application de la directive.

L'article 7, paragraphe 1, sous a), de la directive 79/7précitée, n'autorise pas un État membre qui, en application de cette disposition, a fixé l'âge de la retraite des femmes à 60 ans et celui des hommes à 65 ans à prévoir également que les femmes bénéficient d'une exonération des frais médicaux dès l'âge de 60 ans et les hommes uniquement dès l'âge de 65 ans.

Il n'y a pas lieu de limiter les effets dans le temps du présent arrêt, de sorte que l'effet direct de l'article 4, paragraphe 1, de la directive 79/7précitée, peut également être invoqué à l'appui d'une demande en dommages-intérêts relative à des périodes antérieures à la date de l'arrêt par des personnes n'ayant pas engagé une action en justice ou introduit une réclamation équivalente avant cette date. "

Monsieur Richardson, 64 ans, estime qu'il est victime d'une discrimination fondée sur le sexe au motif que les femmes âgées de 60 à 64 ans, contrairement aux hommes se situant dans la même tranche d'âge, sont exonérées du paiement des frais relatifs à la fourniture des médicaments.

Au Royaume-Uni, peuvent être exonérées de ces frais certaines catégories de personnes en fonction de leur âge, de leur situation ou du type d'affection dont elles sont atteintes. Le tribunal britannique demande à la Cour de Justice si une disposition exonérant des frais médicaux certaines catégories de personnes et notamment certaines personnes âgées relève du champ d'application de la directive 79/7.

Sur ce point, la Cour indique que la directive s'applique aux régimes légaux qui assurent une protection contre les risques de maladie, d'invalidité, de vieillesse, d'accidents du travail et maladies professionnelles et de chômage, et également aux dispositions d'aide sociale lorsqu'elles sont destinées à compléter les régimes légaux. Elle précise que la disposition britannique en cause, dans la mesure où elle fait partie d'un régime légal et protège directement contre le risque maladie, relève du champ d'application de la directive.

Dans sa deuxième question, le tribunal britannique demandait si le paragraphe 1 sous a) de la directive (exclusion du champ d'application de la directive la fixation de l'âge de la pension de vieillesse, ainsi que les conséquences pouvant en découler pour d'autres prestations) s'appliquait au cas d'espèce. La Cour rappelle que "le domaine de dérogation autorisée était limité aux discriminations existant dans les autres régimes de prestations qui sont nécessairement et objectivement liées à la différence d'âge de la retraite". Ainsi, elle accepte les dérogations nécessaires pour éviter de remettre en cause l'équilibre financier du système de sécurité sociale ou pour garantir une cohérence entre le régime de retraites et un autre régime.

Dans ce cas particulier, elle indique que la suppression de la discrimination n'aurait pas d'incidence sur l'équilibre financier au sein du régime des pensions, et ne mettrait pas en péril l'équilibre financier du système de sécurité sociale dans son ensemble. Dans ces conditions, la discrimination n'est pas nécessairement liée à la différence d'âge de la retraite entre les hommes et les femmes et n'est donc pas couverte par la dérogation prévue à l'article 7 § 1 a) de la directive 79/7.

Enfin, à la troisième question du tribunal britannique au sujet de la limitation des effets de l'arrêt dans le temps, la Cour de Justice des Communautés Européennes répond qu'il n'y a pas lieu de limiter les effets de cet arrêt dans le temps.