Affaire C 107/00

Caterina Insalaca et Office national des pensions

Arrêt du 7 mars 2002

Sécurité sociale - Règlement (CEE) n° 1408/71, article 46 à 46 quater - Règles nationales anti-cumul - Prestations de même nature

1) « La réglementation d'un état membre régissant le calcul d'une pension de survie et prévoyant une limitation du plafond fixé pour le cumul d'une pension de retraite et d'une pension de survie lorsque le conjoint survivant peut prétendre à une pension de survie à charge d'un autre état membre constitue une clause de réduction au sens des articles 46 bis et 46 ter du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, du 2 juin 1983, tel que modifié par le règlement (CEE) n° 1248/92 du Conseil, du 30 avril 1992.

2) Les articles 46 bis et 46 ter du règlement (CEE) n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CEE) n° 2001/83 du Conseil, tel que modifié par le règlement (CEE) n° 1248/92, du Conseil, s'opposent à l'application de la réglementation d'un État membre contenant une clause anticumul selon laquelle une pension de survie perçue dans cet État membre doit être réduite du fait de l'existence d'une pension de survie acquise au titre de la législation d'un autre État membre, dès lors que les prestations dues en application de cette réglementation nationale se révèlent moins favorables que celles déterminées en application de l'article 46 dudit règlement ».

En octobre 1998, Madame Insalaca, qui perçoit depuis 1981 une pension de survie du régime italien, a introduit une demande de pension de vieillesse personnelle et une demande de pension de survie auprès de l'office national des pensions (ONP) en Belgique. L'institution belge a accordé à compter du 1er décembre 1998, une pension de retraite et une pension de survie à l'intéressée.

Pour le calcul du montant de la pension de survie, l'ONP a tenu compte de la pension de survie italienne dont était titulaire Madame Insalaca, ce qui a entraîné une réduction de la pension de survie belge.

L'intéressée conteste le calcul de la prestation effectué par l'institution belge au motif que ce calcul est contraire aux articles 46 bis et 46 ter du règlement (CEE) n° 1408/71 qui contiennent les dispositions relatives à l'application des règles anticumul, notamment sur des prestations de même nature.

Le tribunal belge demande à la Cour de justice des Communautés européennes si la règle belge applicable pour le calcul des pensions de survie, constitue une règle de réduction au sens des articles 46 bis et 46 ter du règlement (CEE) n° 1408/71. Dans l'affirmative le tribunal belge demande si pour l'application de sa règle anticumul, l'institution peut prendre en compte la pension de survie accordée en vertu de la législation d'un autre État membre, afin de réduire le plafond de cumul, pension de vieillesse et pension de survie prévu par sa législation.

Sur la première question la Cour rappelle que selon une jurisprudence constante, une règle nationale doit être qualifiée de clause de réduction au sens du règlement, si le calcul qu'elle impose a pour effet de réduire le montant de la pension à laquelle l'intéressé peut prétendre du fait qu'il bénéficie d'une prestation dans un autre État membre. Elle observe que l'application de la réglementation belge a pour effet de réduire le montant total des prestations auxquelles peut prétendre l'intéressée, il s'agit donc d'une clause de réduction au sens des articles 46 bis et 46 ter du règlement.

Sur la deuxième question relative à la réduction du plafond de cumul de la pension de vieillesse et de la pension de survie du fait de la présence d'une pension de survie accordée en vertu de la législation d'un autre État membre, la Cour indique que l'article 12, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 1408/71 permet aux institutions des États membres d'appliquer les règles de réduction prévues par leurs législations, sous réserve des dispositions de l'article 46 ter, paragraphe 1, du règlement qui interdit l'application de règles anticumul sur des prestations de même nature, si la pension est liquidée conformément à l'article 46, paragraphe 2, du règlement (liquidation de la pension par totalisation-proratisation).

Afin de déterminer la nature des prestations, la Cour rappelle que des prestations sont définies de même nature lorsque leur objet, leur finalité, ainsi que les bases de calcul et leurs conditions d'octroi sont identiques. Ce qui est le cas de la prestation belge de survie et de la prestation italienne de survie. Ces deux prestations relèvent donc des dispositions de l'article 46 ter, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 1408/71.

Elle rappelle que les pensions de vieillesse doivent être liquidées en trois étapes : calcul de la pension autonome conformément à l'article 46, paragraphe 1, sous a), i), du règlement. Lors de ce calcul l'institution compétente liquide la pension selon sa législation y compris avec les règles anticumul. Ensuite elle procède au calcul de la pension "proratisée" conformément à l'article 46, paragraphe 1, sous a), ii). Enfin, elle compare le montant de la pension autonome et le montant de la pension "proratisée" et elle verse le montant le plus avantageux des deux.

Elle observe que les prestations de survie belge et italienne sont des prestations de même nature et qu'elles ont été liquidées dans le cadre de l'article 46, paragraphe 2, du règlement, les règles de l'articles 46 ter, paragraphe 1, sont donc applicables. Les règles anti cumul belges ne peuvent pas être appliquées sur la pension proratisée belge dans la mesure où la pension a été liquidée par totalisation-proratisation et qu'il s'agit de prestations de même nature.