Arrêt du 12 mars 2020
Renvoi préjudiciel - Sécurité sociale des travailleurs migrants - Règlement (CE) n° 883/2004 - Article 5, sous b) - Majoration du taux de la pension de vieillesse - Prise en compte d'une allocation versée pour l'éducation d'un enfant handicapé dans un autre Etat membre - Principe d'assimilation des faits
SJ, ressortissante française résidant en Allemagne, a travaillé en France et en Allemagne en tant que professeur agrégé de l'Education nationale française. Elle a bénéficié d'une aide à l'intégration de son enfant handicapée prévue par la législation allemande.
Suite à sa demande, l'institution compétente française lui a attribué une pension de retraite.
SJ conteste l'absence de prise en compte d'une majoration de la durée d'assurance dans le calcul du montant de sa pension de vieillesse. Cette majoration prévue par la législation française bénéficie aux assurés ayant élevé un enfant ouvrant droit à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé.
Se fondant sur le principe d'assimilation des prestations (article 5, sous a), du règlement (CE) n° 883/2004), SJ estime que le taux de sa pension doit être majoré car l'aide allemande est équivalente à l'allocation française.
Dans ce cadre, la juridiction de renvoi interroge la CJUE sur la possibilité d'appliquer le règlement (CE) n° 883/2004 à cette affaire et sur le caractère équivalent de l'allocation française et de l'aide allemande :
La CJUE examine si l'aide allemande constitue une prestation au sens de l'article 3 du règlement (CE) n° 883/2004, qui fixe son champ d'application matériel. Elle vérifie d'abord si cette aide constitue une prestation de sécurité sociale au sens du paragraphe 1 de cet article.
La CJUE rappelle qu'une allocation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale si elle remplit 2 conditions cumulatives :
La Cour précise que la première condition :
Dans cette affaire, l'octroi de l'aide allemande n'est pas subordonné à des conditions objectives, comme un taux d'incapacité. La législation allemande mentionne que cette aide est proposée selon les besoins individuels de l'enfant bénéficiaire. Elle ne remplit pas la première condition et ne constitue donc pas une prestation de sécurité sociale.
La CJUE vérifie ensuite si l'aide allemande constitue une prestation spéciale en espèces à caractère non contributif relevant aussi du champ d'application du règlement (CE) n° 883/2004 conformément à son article 3, paragraphe 3.
L'article 70 du règlement (CE) n° 883/2004, qui définit ces prestations, dispose en son paragraphe 2, sous c), qu'elles sont énumérées à l'annexe X de ce règlement. L'aide allemande ne figurant pas dans cette annexe, elle ne constitue pas une telle prestation.
La Cour conclut que l'aide allemande ne relève pas du champ d'application du règlement (CE) n° 883/2004.
En réponse à la seconde question de la juridiction de renvoi, la CJUE souligne que l'article 5, sous a), du règlement (CE) n° 883/2004 ne vise que les prestations relevant du champ d'application de ce règlement, ce qui n'est pas le cas de l'aide allemande.
Cette disposition n'est donc pas applicable à cette affaire.
La Cour examine si l'article 5, sous b), du règlement (CE) n° 883/2004, qui consacre le principe d'assimilation des faits, est applicable à cette affaire. Cet article prévoit que lorsque, en vertu de la législation d'un Etat membre compétent, des effets juridiques sont attribués à la survenance de certains faits ou événements, cet Etat tient compte des faits ou événements semblables survenus dans tout autre Etat membre comme s'ils étaient survenus sur son propre territoire.
L'article 5, sous b), du règlement (CE) n° 883/2004 s'applique si 2 conditions sont remplies :
Dans cette affaire, la CJUE estime que les 2 conditions sont satisfaites :
La Cour précise que :