Arrêt du 5 mars 2020
Renvoi préjudiciel - Sécurité sociale des travailleurs migrants - Coordination des systèmes de sécurité sociale - Règlement (CE) n° 883/2004 - Articles 3 et 11 - Champ d'application matériel - Prestations relevant du champ d'application de ce règlement - Qualification - Prestation de maladie - Prestation d'invalidité - Prestation de chômage - Personne ayant cessé d'être affiliée à la sécurité sociale d'un Etat membre après y avoir arrêté son activité professionnelle et avoir déplacé sa résidence dans un autre Etat membre - Demande visant à bénéficier d'une allocation de rééducation dans l'ancien Etat membre de résidence et d'emploi - Refus - Détermination de la législation applicable
Ressortissante autrichienne, CW a résidé et travaillé en Autriche, avant de déplacer sa résidence et travailler en Allemagne. Elle a acquis respectivement en Autriche et en Allemagne 59 mois et 235 mois d'assurance.
Suite à sa demande, l'institution compétente autrichienne lui a refusé le bénéfice d'une allocation de rééducation, car elle n'était plus affiliée au régime de sécurité sociale national depuis son déménagement en Allemagne.
CW a contesté cette décision.
La juridiction autrichienne compétente émet des doutes sur la qualification de l'allocation de rééducation. Elle souligne aussi que CW ne relève plus de la législation autrichienne, mais de la législation allemande au titre de sa résidence et conformément à l'article 11, paragraphe 3, sous e), du règlement (CE) n° 883/2004.
Dans ce cadre, elle interroge la CJUE :
La CJUE rappelle d'abord que pour distinguer entre les différentes catégories de prestations de sécurité sociale, le risque couvert doit être pris en compte :
Dans cette affaire, d'une part l'allocation de rééducation est due indépendamment de l'exercice ou non d'une activité professionnelle et ne constitue donc pas une prestation de chômage.
D'autre part, elle vise à couvrir le risque d'inaptitude temporaire, dans la mesure où :
La Cour qualifie donc cette allocation autrichienne de prestation de maladie.
La CJUE relève ensuite que les conditions de l'existence du droit de s'affilier à un régime de sécurité sociale sont déterminées par la législation de chaque Etat membre. Toutefois, ces Etats doivent respecter le droit de l'Union dans l'exercice de cette compétence.
En particulier, les règles relatives à la détermination de la législation applicable prévues par le titre II du règlement (CE) n° 883/2004 s'imposent aux Etats membres. Ils ne peuvent fixer des conditions d'affiliation qui excluent du champ d'application de leur législation de sécurité sociale une personne à laquelle cette législation est applicable conformément à ce règlement. En effet, cette exclusion pourrait la priver de protection sociale, faute de législation qui lui serait applicable.
Dans cette affaire, CW est de nationalité autrichienne et réside en Allemagne, où elle ne travaille plus depuis 2013. En tant que personne économiquement inactive, la législation de son Etat de résidence lui est applicable (article 11, paragraphe 3, sous e) du règlement (CE) n° 883/2004).
Invoquant le principe d'unicité de la législation sociale applicable (article 11, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 883/2004), la Cour conclut que le règlement (CE) n° 883/2004 ne s'oppose pas à une situation dans laquelle une personne qui a cessé d'être affiliée à la sécurité sociale de son Etat membre d'origine, après y avoir arrêté son activité professionnelle et avoir déplacé sa résidence dans un autre Etat membre, se voit refuser, par l'organisme compétent de son Etat d'origine, le bénéfice d'une prestation, dès lors que cette personne ne relève pas de la législation de cet Etat d'origine, mais de celle de son Etat de résidence.